RAKOTOVAO, JOHANESA
1899 à 1966
Église Protestante
Madagascar
Johanesa Rakotovao fut une personnalité marquante du protestantisme malgache pendant la première moitié du XXe siècle.
Bien de que parents originaires de Masinandraina, dans le Vakinankaratra, Rakotovao grandit au pays bara où son père était évangéliste de la Mission norvégienne (NMS), et comme tous les garçons, il commença par garder des bœufs dans des vallées retirées. Mais ses parents l’instruisaient à la maison et il obtint très jeune son « Certificat d’Aptitude à l’Enseignement Primaire » et il fut instituteur dans les écoles de la NMS à Betafo et à Fianarantsoa. Doué, il fait des études de théologie au Séminaire luthérien d’Ivory-Fianarantsoa, de 1924 à 1927 et va pendant onze ans, comme pasteur, sur la côte sud-est de l’île, à Manakara, à Farafangana et à Vohipeno.
Mal à l’aise dans une simple case, à Manakara, il se met, apprenant au fur et à mesure, à construire un presbytère plus confortable et plus vaste. Ne supportant pas de voir les enfants rôder désœuvrés, il édifie une modeste école où il leur fait la classe, au contentement de ses paroissiens qu’il ne délaisse pas pour autant. De plus il continue à étudier la théologie, et les missionnaires font appel à lui pour enseigner l’Ancien Testament au Séminaire d’Ivory.
Devenu professeur, il se met alors sérieusement à l’étude des langues anciennes : grec et hébreux, et modernes : anglais et norvégien, car il pratiquait déjà couramment le français.
Rakotovao avait une véritable faim de livres – nécessaires à sa culture personnelle – et il s’ingéniait à faire des économies pour s’en acheter. Plutôt que d’aller en chemin-de-fer de Manakara à Fianarantsoa, il préférait faire à pied les 163 km et s’acheter des livres avec le prix du billet. Quand, en 1938-1939, il fut envoyé comme délégué des Églises protestantes à Tambaran (Madras) aux Indes, il voyagea sur le pont plutôt que de prendre une cabine et eut, avec la différence, de quoi se procurer de la lecture.
Il ne faisait d’ailleurs pas que lire. Il écrivit aussi, soit dans les périodiques religieux, en particulier dans Ny Mpamangy « Le Visiteur » ou dans la petite gazette paroissiale qu’il fonda à Antsirabé. Enfin, il publia un bon commentaire d’Ésaïe, et un des cantiques qu’il a composés figure au recueil des Églises luthériennes malgaches.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, des troupes africaines furent stationnées quelques temps à Madagascar et J. Rakotovao, se sentant à leur égard charge d’âmes, s’efforça de leur donner une instruction religieuse.
En 1950-1951, il fit un voyage d’études en Norvège et aux Etats-Unis d’Amérique. A Oslo, il rencontra Sigmund Mowinckel, le fameux professeur d’Ancien Testament, qui loua son aptitude à l’hébreu et déplora qu’il n’eût pas fait dans cette discipline des études plus précoces et plus systématiques, ce qui dépréciait quelque peu ses thèses et empêchait qu’elles pussent être imprimées. De retour à Madagascar, J. Rakotovao se tourna vers la politique et milita pour l’indépendance, au point de démissionner de son enseignement à Ivory. Bientôt, pourtant, en 1954, il acceptait l’appel de la paroisse d’Ampamarinana à Tananarive, à succéder au pasteur Randzavola.
Il quitta ce poste en 1963 pour revenir dans sa ville natale, comme pasteur de la paroisse luthérienne d’Antsirabé. En février 1966, il était élu président du Synode de l’Église luthérienne pour la région nord, mais il mourut le 17 novembre de la même année. A titre posthume, il fut décoré de l’Ordre National Malgache.
Son testament se terminait par ces mots : « Aimez-vous les uns les autres. » A. Snekkenes, L. Molet
Cet article, réimprîmé ici avec permission, est tiré d’Hommes et Destins : Dictionnaire biographique d’Outre-Mer, tome 3, publié en 1977 par l’Académie des Sciences d’Outre-Mer (15, rue la Pérouse, 75116 Paris, France). Tous droits réservés.